Pour une loi climat à la hauteur des enjeux écologiques !

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Agriculture

Pour une loi climat à la hauteur des enjeux écologiques !

Le 2 septembre 2020, la commission du Parlement européen en charge des questions agricoles était appelé à se prononcer sur la future loi climat.

Ci-dessous, vous retrouverez le fil que j’ai publié sur Twitter à cette occasion.

Notre Commission parlementaire vote un Avis sur la « loi climat ». Il s’agit d’un texte proposé par la Commission européenne pour atteindre la « neutralité climatique » en 2050. C’est l’un des textes phares du Green Deal, ce plan « écologique » proposé par Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, après les élections européennes de 2019. 

Mais la « loi climat » proposée par la Commission européenne n’éclaire pas bien loin. Le texte soumis au Parlement est creux et le chantier est vaste pour hausser celui-ci au niveau de l’urgence climatique et environnementale.

Autant le dire tout de suite : compte tenu de l’obstruction du PPE (groupe de LR), de Renew (groupe de LREM) – et du climatoscepticisme outrancier de l’extrême-droite, la Commission de l’Agriculture ne paraît guère devoir y contribuer par cet Avis.

Qu’est-ce que la neutralité climatique ? Il s’agit de rendre les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre équilibrées dans l’UE. Au plus tard en 2050. Pas plus d’émissions (de méthane par les bovins par ex.) que d’absorptions (dans le bois des forêts par ex.).

Le but : limiter la quantité de gaz à effets de serre dans l’atmosphère et donc le réchauffement. Tenir les objectifs de température des Accords de Paris que l’UE s’est engagée à respecter. Eviter les catastrophes qui s’avancent si nous n’agissons pas très rapidement. Pour limiter la hausse de la température à 1,5 degrés, nous avons jusqu’en 2030 pour réduire chaque année nos émissions de 7,6 %. Donc au moins 68 % de réduction par rapport à 1990.

Concrètement, nous avons 10 ans.

En « COMAGRI » (Commission de l’Agriculture et du développement rural), la droite et Renew refusent pour le moment d’entendre parler d’un objectif supérieur à 55 % de réduction. Ils enterrent d’emblée les Accords de Paris et vident immédiatement de sens cette « loi climat ». Ils nous mettent en danger. 

L’extrême-droite va encore plus loin dans la négation de l’urgence climatique. Actuellement, il existe un objectif très insuffisant de 40 % de réduction des émissions de l’UE d’ici 2030. Objectif qu’il s’agit de rehausser. Cependant, ils proposent de le réduire encore !

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Autre aspect ignoré par la proposition de loi : les émissions hors de l’UE. Avec la proposition actuelle, il est possible de continuer comme avant ! Il suffit de délocaliser les productions (et donc les émissions) pour atteindre la neutralité climatique facilement !

Nous avons voulu traiter le problème avec une approche par plafonnement de l’empreinte carbone des émissions importées et en imposant un devoir de vigilance climatique des entreprises pour qu’elles réduisent leurs émissions dans le monde entier. Cependant cela a été rejeté à ce stade.

Il y a quand même un point positif à ces négociations. Même si on en reste loin, un chemin semble s’ouvrir vers la création d’une taxe carbone aux frontières de l’UE. Le travail sur ce point se poursuit prochainement : je suis rapporteur fictif sur le mécanisme d’ajustement carbone. Je vous tiendrai au courant des avancés sur ce point.

Rappelons par ailleurs qu’il s’agissait de l’Avis de la Commission de l’Agriculture sur la loi climat. L’agriculture est responsable d’une grande quantité de GES : au moins 20 % des émissions de la France et 400 mégatonnes de CO2e/an dans l’UE soit 10 % (estimation basse) des émissions de l’UE.

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Il s’agit quasi-entièrement de méthane (bovins) et de protoxyde d’azote (engrais). Notre objectif dès le départ était de réduire ces émissions de l’agriculture. Mais la majorité a préféré faire comme si elles n’existaient pas, en toute irresponsabilité.

Continuons donc comme avant ! L’agriculture à elle seule émet déjà plus que les forêts européennes ne stockent ? Ses émissions n’ont pas diminué depuis 2005 ? Pas de problème ! Et misons plutôt tout un nouveau marché carbone !

Enfin mentionnons les puits de carbone naturels comme les forêts. Elles sont cruciales pour stocker du carbone et atteindre les objectifs de température des Accords de Paris. Mais les forêts européennes restent très menacées. Vous pouvez d’ailleurs retrouver mon article sur la nouvelle stratégie forestière européenne ici.

Avec d’autres, nous avons voulu les protéger strictement. Sans résultat pour le moment dans cet Avis de la Commission de l’Agriculture et du développement rural, qui laisse ainsi de côté tous les sujets dont elle a la responsabilité. Cet Avis est une étape dans la bataille parlementaire. Ma collègue Leila Chaibi a mené la même dans la Commission Transport se concentrant sur les problématiques liées aux émissions des transports. Retrouvez son thread en cliquant ici.

La bataille se poursuit au Parlement la semaine prochaine avec un vote crucial en Commission de l’environnement où je siège également. Puis le texte atteindra la séance plénière début octobre.

A cette occasion, il faudra absolument :

  • Faire primer la science et l’écologie populaire sur l’idéologie mortifère de la compétitivité.
  • Une cible de 70 % de réduction des émissions de GES en 2030.
  • Renforcer les absorptions par les puits de carbone naturels.
  • Traiter le problème des émissions importées/hors UE.